Deux chercheurs australiens ont remporté le prix Ig-Nobel d’économie pour leurs travaux sur la dépendance aux jeux d’argent. Leur étude, qui mélange caresses de crocodiles et machine à sous, a de quoi surprendre. Mais elle permet de mieux cerner le comportement des joueurs dépendants, et de les aider plus efficacement.

Une idée pas si bête

L’idée des chercheurs australiens prête à rire, mais elle est tout à fait dans l’esprit du Ig-Nobel, la drôle de variante du prix Nobel. Le but de cette cérémonie est simple : récompenser des recherches qui peuvent sembler absurdes, mais qui sont susceptibles de bouleverser radicalement notre vision des choses.

C’est bien le cas ici… En étudiant les réactions de joueurs après avoir approché un crocodile, les deux chercheurs semblaient avoir un peu perdu la tête. Mais à partir de cette analyse, ils ont pu tirer quelques conclusions très intéressantes. Leur recherche devrait aider les scientifiques à mieux comprendre les mécanismes de dépendance au jeu. Cela pourrait surtout leur permettre d’imaginer des thérapies adaptées à cette pathologie.

Une étude on ne peut plus sérieuse

L’étude a démarré en 2010, dans une ferme à crocodile du Queensland australien. Là-bas, 103 personnes ont accepté de se rapprocher dangereusement de ces reptiles, allant parfois jusqu’à les toucher, avant d’aller faire un petit tour dans un casino adjacent.

Les premiers résultats ont confirmé ce que l’on aurait pu imaginer instinctivement. Les personnes ayant apprécié cette rencontre insolite ont eu tendance à prendre confiance, et à jouer de plus grosses mises. Les personnes qui, au contraire, ont mal vécu cette expérience ont traîné leur peur jusque dans le casino. Leurs mises étaient plus petites, et leur prise de risque globalement moindre.

Des résultats plutôt surprenants et encourageants

Mais les chercheurs ne se sont pas contenté de nous conforter dans nos idées reçues. En amont, ils avaient pris soin d’étudier le caractère des personnes sélectionnées, afin d’obtenir des résultats plus pertinents. C’est surtout ici que l’étude s’avère intéressante et susceptible d’aider la recherche.

Parmi les 103 personnes sélectionnées, les chercheurs avaient identifié des joueurs ayant des tendances compulsives, et d’autres joueurs plus modérés. L’étude montre que les personnes qui ont généralement du mal à se contrôler dans un casino sont plus prudentes après avoir ressenti un stress négatif. A l’inverse, les personnes généralement modérées peuvent miser gros après une expérience puissante, mais positive.

On voit bien tout l’enjeu de cette recherche atypique : tenter d’inventer des thérapies adaptées aux personnes dépendantes, tout en imaginant des systèmes de prévention précis et efficaces. Utiliser la peur ou l’adrénaline pour venir en aide aux personnes dépendantes peut fonctionner, mais seulement sous certaines conditions. Selon le type de personnalité, les méthodes s’avèrent plus ou moins adaptées, et ce qui est utile pour l’un peut parfois être néfaste pour l’autre.